Antonio Porchia
Donner, n'est pas ce que nous donnons mais ce que nous aimerions donner; mais cela, nous ne le donnons jamais car nous ne le possédons pas.
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Nous avons un monde pour chacun, mais nous n'avons pas un monde pour tous.
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Parfois ce que je désire et ce que je ne désire pas se font tant de concessions qu'ils en viennent à se ressembler.
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Parfois, la nuit, j'allume une lumière pour ne pas voir.
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Quand le superficiel me fatigue, il me fatigue tant que pour me reposer, j'ai besoin d'un abîme.
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Qui veut faire un paradis de son pain fait un enfer de sa faim.
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Je parle avec la pensée que je devrais me taire. Et je parle.
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Qui demeure beaucoup avec soi, s'avilit.
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Le profond, vu avec profondeur, est surface.
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Nous donnons un nom, puis nous ne savons quel nom donner à ce nom.
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Je te porterai des fleurs là où ils savent que tu es, et là où je sais que tu es; en deux endroits différents.
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Tant que nous croyons avoir quelque valeur, nous nous faisons mal.
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Le froid est bon conseiller, mais il est froid.
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Dans la rue, rien d'autre que la rue. Et dans ta maison, rien. Pas même la rue.
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Non, elle ne peut être uniquement à toi, parce qu'elle est une fîeur, et qu'une fleur ne peut qu'être à tous.
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Maintenant que tu es tout ailes, qu'est-ce qu'elles élèveront ?
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La vérité a trés peu d'amis et le trés peu d'amis qu'elle a vont au suicide.
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Les hauteurs guident, mais dans les hauteurs.
(Extrait de Voix, son unique livre)
Il est né en 1885 en Calabre. Emigré en Argentine avec sa famille à l'âge de deux ans, il est mort à Buenos Aires en 1968.
Roberto Juarroz [Voix, Fayard, Documents Spirituels 16, Paris, 1979.] Ces pages ne prtendent pas tre une analyse, une critique ou un commentaire, mais une rflexion sur la profondeur, au bord d'une ...